ETAPE 42

El Ramla - Kairouan (175 km)

D’une mer à l’autre, nous sommes passés du bleu de la Méditerranée au vert des oliviers. Des milliers, des dizaines de milliers, des centaines de milliers peut-être, des millions, allez savoir ! Toute la journée, la route a fendu leurs alignements rectilignes couvrant les collines et l’horizon. L’air exhalait régulièrement des parfums écœurant de marinades lorsque nous croisions un pressoir caché derrière les troncs noueux. Parfois, au milieu, quelques rangées d’amandiers et, sous des serres blanches, des alignements de fraises, qui constitueront justement mon repas du soir !

Kairouan. Pour la premières fois, les « rabatteurs » et « guides » se montrent insistants et désagréables. Dommage. La médina, blanche et bleue, est réellement un enchantement, pleine d’enfants sortant de l’école, d’hommes se rendant à la mosquée et de femmes revenant du boulanger, chacune avec leurs galettes à la main. Les porches décorés de faïences, les moucharabiés en fer forgé, les arches permettant de consolider tel ou tel mur créent un ensemble harmonieux dans lequel je m’égare avec plaisir.

Un barbier. Je m’arrête. Ayant volontairement laissé mon rasoir au vestiaire depuis de nombreuses années, je prends ainsi plaisir, tous les 10 jours environ, à entrer me faire tailler la barbe dans une petite échoppe. Le tour du monde des barbiers. C’est toujours un agréable moment ! Raseur mécanique ou électrique, équipé de tout le matériel ou bien d’un simple lame toute nue, pourvu de fauteuils confortables ou de tabourets branlants, meublé de larges glaces ou d’un petit bout de miroir étoilé, l’œil rivé sur un match de foot ou l’oreille à l’écoute d’un  tube ou d’un sermon, chaque coiffeur est une rencontre agréable avec un quotidien banal. C’est également le temps de l’attente, de la discussion, de la rencontre avec les autres clients ou de simples voisins venus passer un moment. Et puis c’est toujours un plaisir de se faire chouchouter ! A Bangui, mon adresse favorite était le « Ministère de la Beauté ». A Kairouan, le nom s’affichait en arabesques illisibles pour moi. Dommage. Mais ce soir, pour mon miroir, me voici rasé de près !