Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Bangui - Alger (et plus si affinités)
8 mars 2010

Les rêves des autres

« Si le vent soulève les sables ». L’histoire d’un autre Sahara. Celui de ceux qui ne peuvent en sortir. Une fillette meurt de soif dans le désert. Dans le ciel immaculé, la trace blanche d’un avion, loin, là haut.

-          Tu crois qu’ils nous cherchent ?

-          Je crois qu’ils ne savent même pas qu’on existe.

Mais il n’y a pas besoin d’être aussi loin, aussi haut. A moto également, on croise des vies sans se retourner. Au contrôle de gendarmerie d’Arlit, entre autre. Le sable, de partout, la chaleur, le vent. Je m’étais abrité sous une bâche pendant les formalités. Sans ombre, contre le mur d’une bicoque, quelques migrants attendaient. Depuis combien de temps ? Pour combien de temps ? Il y avait une jeune fille notamment, habillée d’une doudoune, poussiéreuse, assise les mains entre les jambes. Je suis reparti.

En quelques semaines, j’ai ainsi parcouru une grande partie de ce chemin vers l’Eldorado et croisé des migrants à chacune des étapes de cet exil. Dès le premier soir, en Centrafrique, dans ce village de chercheurs de diamants, il y avait cet instituteur qui ne se voyait aucun avenir perdu dans sa brousse. Il rêvait de plus loin. Dans les petites villes ensuite, ces jeunes agriculteurs, puis dans les capitales, ces jeunes de province. Tous avec de petits boulots, tous avec si peu et beaucoup de rêves, à la recherche de l’adresse email d’un blanc, qui les fera venir, à la recherche d’un plan, pour se faire de l’argent, à la recherche d’un « frère », pour un peu de boulot.

Puis, en poursuivant vers le nord, ils étaient là sur les camions, ou entassés dans les taxis, là coincés aux barrages de police, là au bord de la route, espérant une occasion pour plus loin, avec leur baluchon. Dans les villes, c’était encore eux, exploités à présent car sans le sous, dans les hôtels, dans les restaurants, sur les chantiers, par les passeurs. Main-d’œuvre discrète, peu chère, instable. Certains restaient quelques semaines, d’autres quelques années. Certains, arrivés au Niger, ou en Algérie, jugeaient que le voyage était suffisant. D’autres espéraient encore atteindre plus loin.

Un passeport français, des euros. Mon voyage n’aura duré que quelques semaines, sans risque et sans objectif autre que le plaisir. Je cherchais des dunes là où d’autres jouaient leur vie. Paradoxes et inégalités de notre monde. Banalité.

Publicité
Publicité
Commentaires
Bangui - Alger (et plus si affinités)
Publicité
Publicité