ETAPE 23

Tamanrasset – In Salah (720 km)

06.00. Affreuse musique (???) électronique du réveil. Lever à l’aube pour rouler à la fraîche et arriver avant la nuit ! Manque de pot, le guide n’arrivera pas à 06.30 mais à 08.00… accompagné d’un grand sourire… Entretemps, j’aurai largement eu le temps de discuter avec le gardien de nuit, un Algérien d’environ 70 ans à la vie tumultueuse ! Manœuvre dès 12 ans sur les sites d’essais nucléaires français, puis maçon en Suisse, au Canada, passeur de voitures sur le Niger et le Mali, vendeur de cigarettes au Burkina Fasso, père de 11 enfants et, finalement, installé à Tamanrasset, le plus bel endroit de la terre et gardien de nuit pour « passer le temps ». Ca nous ferait un sacré blog tout ça !

Mais il nous faut bien quitter ce paradis et nous pointons donc plein nord. Les 300 premiers kilomètres sont sans grand intérêt, rocailleux et vaguement parsemés de mornes monticules sans attrait. Pas un brin d’herbe. Pas un village. Pas un chameau. Mais un chantier pharaonique : la pause d’un double pipeline reliant Tamanrasset à In Salah, le long duquel sont échelonnés 5 ou 6 forages, l’objectif étant de répondre aux besoins en eau potable de ces villes en pleine croissance. Bien entendu, ce sont les Chinois qui mettent en œuvre le chantier ! 2 fois 700 km d’un tuyau de 1,20 m de diamètre à poser, souder, enterrer. Les forages également à creuser, accompagnés de leur « base-vie » des ensembles d’immeubles derrière murs et barbelés qui connaîtront certainement tous les gadgets indispensables du confort moderne. Mais en attendant, ça nous donne un chantier interminable (et qui gâche le paysage !), des dizaines et des dizaines d’équipes, d’engins de chantier, de camions, de minibus faisant d’incessantes navettes… un désert bien peuplé en somme !

C’est étrange d’ailleurs cette impression très relative. Le climat est au moins aussi aride que plus au sud, les distances entre les rares villages sont bien plus importantes, la vie en fin de compte moins présente mais il suffit du ruban d’asphalte d’une route et de la tranchée d’un pipeline pour que le désert ne devienne plus qu’une zone … aride ?

Finalement, nous entrons dans les gorges d’Arak, en fait un large oued qui traverse un petit massif montagneux. Pas de quoi fouetter un chat mais ça fait plaisir les changements de paysage. La sortie est par contre beaucoup moins réjouissante. L’impression d’ouvrir la porte d’un four et d’en recevoir la buée en pleine figure. Devant, tout est plat et sableux. Quelques dunes, des vraies, de plusieurs dizaines (centaines ?) de mètres de haut mais surtout, surtout, un vent incessant soufflant entre 60 et 80 km / h et venant de l’ouest, perpendiculaire donc à la chaussée. Affreux… 250 km à résister aux embardées de la moto dans une visibilité qui ne dépasse plus les quelques centaines de mètres. Sur la route, le sable chassé par le vent forme des draperies sans cesse recommencées qui donnent l’impression de voler. Lorsqu’un virage nous emmène vers l’ouest, vent de face, je ne dépasse plus les 60 km / h. C’est mon guide, derrière, dans son gros 4x4 qui est content !

La course avec le soleil voilé se poursuit et c’est entre chien et loup que nous entrons à In Salah. Impression de me retrouver à Québec une fin d’après midi venteuse de février. Même halot autour des lampadaires, mêmes entassements mous et doux sur la chaussée, contre les murs, même absence de vie.

Mais c’est bien dans un poste de gendarmerie algérien que nous échouerons une fois de plus. Ras le bol de ce flicage ! Les policiers sont très très agréables, toujours prêts à discuter, à offrir un verre d’eau mais leur règlements commencent sacrément à me peser ! Je n’ai même pas le droit de dormir chez le guide qui m’invitait dans sa famille ! Obligé d’aller à l’hôtel !!!! N’importe quoi !!!

Et bien il ne me reste plus qu’à dormir… remarquez, après 11h de pilotage, ça peut être utile !